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AFRIQUE DU SUD: Recrudescence du sentiment xénophobe

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La police sud-africaine est en état d'alerte en cas de nouveaux affrontements entre les habitants d'Alexandra, et les vendeurs ambulants étrangers.
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Alexandra est un township de Johannesburg et l’une des zones les plus pauvres du pays. Mais de leurs cabanes, les habitants peuvent contempler les gratte-ciel de Sandton, l’un des quartiers commerciaux les plus riches du continent, à quelques kilomètres de là. Des personnes y affluent de tout le pays et des contrées voisines pour gagner leur vie.

Se sentant marginalisées, les communautés sud-africaines ont créé deux groupes controversés qui battent campagne contre les étrangers sans papiers. Il s’agit du Mouvement Alexandra Dudula et de l’Opération Dudula. Dudula, mot originaire de la langue zouloue signifie « repousser » ou « refouler« , ce qui indique clairement leur intention. Bien que ces deux groupes soient distincts, ils ont un but identique, qui est de chasser les migrants africains sans papiers de leurs communautés. Ils pensent qu’en le faisant, ils peuvent s’assurer que les emplois et les opportunités commerciales reviennent aux Sud-Africains. La pauvreté est le principal moteur de la tension, les sud-africains estiment, que les étrangers sont la cause de nombre de leurs difficultés.

Leurs campagnes font craindre à une nouvelle flambée de violence xénophobe dans le pays.

La différence entre les deux groupes

Le Mouvement Alexandra Dudula a été fondé l’année dernière. Ses auteurs affirment que des étrangers occupent illégalement des logements fournis par le gouvernement à Alexandra, destinés aux citoyens pauvres. Mais la campagne s’est élargie pour inclure un appel à tous les migrants africains sans papiers à cesser leur commerce à Alexandra. Le mois dernier, le mouvement a fermé toutes les échoppes appartenant aux étrangers ne présentant pas les papiers nécessaires à la gestion de l’entreprise ou un passeport valide et les ont ensuite attribué à des Sud-Africains. Toutes les actions du groupe n’ont pas été légales et les autorités enquêtent sur des cas de désordre public et d’intimidation.

« En tant que Sud-Africains, nous sommes au chômage et nous avons faim. Tout ce que nous voulons, c’est trouver du travail nous aussi. Comment veulent-ils que nous survivions dans notre propre pays ?« , a déclaré Wendy Sithole, une résidente d’Alexandra à la BBC.

L’opération Dudula a été fondée par Nhlanhla Lux Dlamini, agé de 33 ans. Il s’est fait connaître en juin dernier lorsque les habitants de Soweto ont défilé dans le township dans le cadre d’une opération dite de « nettoyage« . Elle visait les trafiquants de drogue présumés et les personnes qui occupaient illégalement des biens publics.

L’opération Dudula est basée dans le township de Soweto à Johannesburg, à plus de 25 km de l’autre côté de la ville. Mais tout comme à Alexandra, le champ d’intérêt du groupe s’est élargi. Ils souhaitent que les nombreux propriétaires de magasins étrangers en Afrique du Sud ferment leurs portes et quittent le pays, et aussi que les petites entreprises, telles que les restaurants et les magasins, n’emploient que des citoyens sud-africains. Pour les militants, les établissements Sud-Africains embauchent des sans-papiers au détriment des nationaux parce qu’ils peuvent les payer moins que le salaire minimum.

Les autorités ont déclaré que si cela peut se produire dans certains endroits, ce n’est pas un problème généralisé.

Les deux groupes ont nié que leurs motivations soient xénophobes et affirment qu’ils ne font que protéger les moyens de subsistance des Sud-Africains, ce que, selon eux, le gouvernement du Congrès national africain (ANC) ne fait pas. Ils affirment également n’etre affiliés à aucun parti politique.

Quelques réactions

Les étrangers ont le sentiment d’être tenus pour responsables de problèmes plus vastes.

Sam Manane, Mozambicain d’origine et vendeur de snacks à Alexandra depuis 10 ans, a déclaré à la BBC « Nous ne prenons le travail de personne, nous créons nos propres opportunités, nous n’empêchons pas les Sud-Africains de faire de même. Nous sommes juste ciblés ».

Le gouvernement national n’a pas encore réagi mais le premier ministre de la province de Gauteng, qui comprend Johannesburg, David Makhura, de l’ANC, a déclaré qu’il était préoccupé par les récentes violences contre les ressortissants étrangers à Alexandra. Il a appelé les groupes de la société civile à travailler avec le gouvernement pour promouvoir la paix et la tolérance.

Mais certains partis d’opposition tentent de tirer un profit politique de cette question. L’un d’entre eux, l’Alliance patriotique (PA) nouvellement formée et dirigée par l’ex-prisonnier Gayton McKenzie, adopte une approche dure, il souhaite que tous les sans-papiers quittent le pays.

Au début de l’année, des membres de l’opposition Economic Freedom Fighters se sont rendus à l’improviste dans des restaurants de Johannesburg pour « inspecter » la proportion de travailleurs étrangers employés et faire pression sur les entreprises pour qu’elles embauchent davantage de Sud-Africains.

En ce qui concerne la vérification du statut des personnes, le gouvernement a déclaré qu’il faisait davantage pour s’assurer que les personnes avaient les bons documents, mais cela prendra du temps.

Recrudescence

Ce n’est pas la première fois que l’on assiste à une recrudescence du sentiment xénophobe en Afrique du Sud. En 2008, le pays a connu une vague d’attaques contre des réfugiés et des migrants. Plus de 60 personnes auraient été tuées et des milliers déplacées. En 2015, de nouvelles flambées de violence xénophobe contre des africains ont eu lieu, principalement dans les villes de Durban et de Johannesburg, ce qui a conduit au déploiement de l’armée pour dissuader de nouveaux troubles.

Et il y a trois ans, une autre hausse d’attaques xénophobes a poussé des centaines de Nigérians à quitter le pays. On ne sait pas exactement pourquoi la question revient sur le tapis, mais les nombreux problèmes économiques du pays ont été exacerbés par l’impact des mesures barrières de Covid-19 qui ont entraîné la perte d’innombrables emplois et une forte hausse du coût de vie.

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