Omicron, une nouvelle variante de Covid-19 inquiète les scientifiques

Vendredi, l’organisation mondiale de la santé (OMS) a annoncé qu’elle avait désigné la nouvelle variante du coronavirus, B.1.1.529, comme une variante préoccupante, nommée Omicron.

Outre l’Afrique du Sud, la nouvelle variante a été détectée au Botswana, à Hong Kong et en Belgique.

Elle semble se propager rapidement dans certaines régions d’Afrique du Sud et les scientifiques craignent que son nombre inhabituellement élevé de mutations ne la rende plus transmissible et n’entraîne une évasion immunitaire.

Le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies a déclaré qu’il existe un risque « … très élevé » que la nouvelle variante se propage en Europe.

Selon un communiqué de l’OMS, le Groupe consultatif technique de l’OMS sur l’évolution du virus SRAS-CoV-2 (TAG-VE), un groupe d’experts indépendants, s’est réuni vendredi pour discuter de la variante. Ils ont recommandé à l’OMS de désigner la variante comme « préoccupante », en se référant au grand nombre de mutations de la variante, à la possibilité d’un risque accru de réinfection et à d’autres éléments. Un certain nombre d’études sont en cours et l’OMS informera les États membres et le public si nécessaire.

Elle a appelé les pays à renforcer leurs efforts de surveillance et de séquençage afin de mieux comprendre les variantes du coronavirus.

« Au départ, il s’agissait de foyers groupés, mais depuis hier, nos scientifiques du Réseau de surveillance génomique nous ont indiqué qu’ils observaient une nouvelle variante« , a déclaré jeudi Joe Phaahla, ministre sud-africain de la Santé, soulignant que l’on ne sait pas actuellement où la variante est apparue.

Les autorités sud-africaines ont initialement déclaré qu’il y avait un cas confirmé chez un voyageur de l’Afrique du Sud à Hong Kong. Puis, vendredi, les autorités sanitaires de Hong Kong ont identifié un deuxième cas de la variante B.1.1.529 chez des voyageurs de retour au même étage d’un hôtel désigné en quarantaine.

Vendredi également, le gouvernement belge a déclaré qu’une personne récemment arrivée de l’étranger et non vaccinée avait été testée positive à la nouvelle variante, ce qui constitue le premier cas en Europe.

Tulio de Oliveira, le directeur du Centre sud-africain pour la réponse et l’innovation en matière d’épidémies, a déclaré que la variante présentait « beaucoup plus de mutations que ce à quoi nous nous attendions », ajoutant qu’elle se « propageait très rapidement et que nous nous attendions à voir une pression sur le système de santé dans les jours et les semaines à venir ».

Les virus, y compris celui qui cause le Covid-19, mutent régulièrement et la plupart des nouvelles mutations n’ont pas d’impact significatif sur le comportement du virus et la maladie qu’il provoque.

Le Dr Ashish Jha, doyen de l’école de santé publique de l’université Brown, a toutefois déclaré à CNN que la variante « se comportait différemment » et qu’il « semble qu’elle soit beaucoup plus contagieuse que la variante Delta« .

Plusieurs pays, dont les États-Unis, ont imposé de nouvelles restrictions pour les voyages. Les marchés aux États-Unis, en Asie et en Europe ont fortement chuté après la nouvelle de sa découverte.

Selon CNN, des responsables de l’administration de Joe Biden ont déclaré que suivant les conseils des autorités sanitaires américaines, le président américain Biden va restreindre les voyages en provenance d’Afrique du Sud, du Botswana, du Zimbabwe, de Namibie, du Lesotho, d’Eswatini, du Mozambique et du Malawi. Cette mesure ne s’applique toutefois pas aux citoyens américains et aux résidents permanents légaux. Pour ce qui concerne les voyageurs internationaux, ils doivent toujours subir un test de dépistage négatif avant le voyage.

Informations sur la nouvelle variante

Lawrence Young, virologue et professeur d’oncologie moléculaire à la Warwick Medical School, au Royaume-Uni, a déclaré que la variante Omicron était « très inquiétante ». « Il s’agit de la version la plus fortement mutée du virus que nous ayons vue à ce jour. Cette variante porte certaines modifications que nous avons déjà vues dans d’autres variantes, mais jamais toutes ensemble dans un seul virus. Elle présente également de nouvelles mutations« , a déclaré M. Young dans un communiqué.

Le variant présente un nombre élevé de mutations, environ 50 au total. Les chercheurs sud-africains en génomique ont indiqué jeudi que plus de 30 de ces mutations se trouvaient dans la protéine spike, la structure que le virus utilise pour pénétrer dans les cellules qu’il attaque.

Neil Ferguson, le directeur du MRC Centre for Global Infectious Disease Analysis à l’Imperial College de Londres, a déclaré dans un communiqué que le nombre de mutations sur la protéine spike était « sans précédent ». « Le gène de la protéine spike est la protéine qui est la cible de la plupart des vaccins. On peut donc craindre que cette variante puisse avoir un plus grand potentiel pour échapper à l’immunité préalable que les variantes précédentes« , a déclaré Neil Ferguson.

Sharon Peacock, professeur de santé publique et de microbiologie à l’Université de Cambridge, a déclaré que si le nombre total de cas de Covid-19 est relativement faible en Afrique du Sud, il a connu une augmentation rapide au cours des sept derniers jours.

Selon elle, le nombre de cas est passé de 273 nouvelles infections enregistrées le 16 novembre, à plus de 1 200 cas le 25 novembre, dont plus de 80 % dans la province de Gauteng.

« Le tableau épidémiologique suggère que cette variante pourrait être plus transmissible, et plusieurs mutations sont compatibles avec une transmissibilité accrue« , a déclaré t’elle dans un commentaire partagé par le Science Media Centre du Royaume-Uni.

Elle a ajouté que si la signification des mutations et de leur combinaison est inconnue, certaines de celles présentes dans la dernière variante ont été associées dans d’autres cas à une évasion immunitaire.

Jha a également déclaré que les scientifiques étaient préoccupés par la vitesse à laquelle la variante Omicron s’est imposée. « Celle-ci est devenue dominante très rapidement en Afrique du Sud, dans les régions où elle a été trouvée, en l’espace de quelques jours à quelques semaines, et non de quelques mois« .

Ce que nous ne savons pas

Peacock, de Oliveira, Ferguson, Jha et d’autres scientifiques ont déclaré qu’il était trop tôt pour connaître l’impact total des mutations sur l’efficacité du vaccin.

M. de Oliveira a souligné que les injections contre le Covid-19 restent le meilleur moyen contre le virus, ajoutant que des études en laboratoire doivent encore être menées pour tester l’évasion du vaccin et des anticorps.

« Je ne pense pas que nous allons assister à une situation où les vaccins seront rendus inutiles« , a déclaré Jha. « Je pense que c’est excessivement improbable. La question est de savoir si l’efficacité des vaccins sera légèrement affectée ou si elle le sera fortement. Je pense que nous aurons des données préliminaires probablement dans les prochains jours. »

D’autres études doivent aussi être menées afin de comprendre la gravité clinique de la variante par rapport aux variantes précédentes.

L’origine de la nouvelle mutation n’est pas claire non plus. Bien qu’elle a été identifiée pour la première fois en Afrique du Sud, elle peut provenir d’ailleurs. « Il est important de ne pas supposer que la variante est apparue en Afrique du Sud« , a déclaré M. Peacock.

Vendredi, Moderna, le fabricant de vaccins a déclaré que la combinaison des mutations observées dans la nouvelle variante Omicron représente un « risque potentiel important d’accélération de l’affaiblissement de l’immunité naturelle et induite par la vaccination« .

Il a ajouté que l’entreprise travaillait rapidement pour tester la capacité de son vaccin à neutraliser la nouvelle variante et que les données étaient attendues dans les semaines à venir.

AstraZeneca, a déclaré qu’il cherchait à comprendre l’impact de la variante Omicron sur son vaccin contre le coronavirus, et qu’il testait sa thérapie combinée d’anticorps contre la nouvelle variante. La plateforme utilisée dans le vaccin permet à la société de répondre rapidement aux nouvelles variantes, a déclaré un porte-parole d’AstraZeneca.

« AstraZeneca mène également déjà des recherches dans les endroits où la variante a été identifiée, à savoir au Botswana et en Eswatini, ce qui nous permettra de recueillir des données en situation réelle de Vaxzevria contre cette nouvelle variante du virus« , a déclaré le porte-parole.

L’utilisation du vaccin d’AstraZeneca est actuellement interdite aux Etats-Unis.

Johnson & Johnson a déclaré qu’il testait son vaccin contre la nouvelle variante.

Félicitations aux autorités sanitaires sud-africaines pour la réaction rapide

Les scientifiques ont félicité les autorités sanitaires sud-africaines pour leur réaction rapide à une épidémie de Covid-19 dans la province de Gauteng, qui a conduit à la découverte de la nouvelle variante.

Lorsque les cas ont commencé à augmenter dans la province à un rythme plus élevé qu’ailleurs, les experts de la santé se sont concentrés sur le séquençage des échantillons des personnes testées positives, ce qui leur a permis d’identifier rapidement la variante B.1.1.529.

Mme Peacock a déclaré que le ministère sud-africain de la santé et ses scientifiques « méritent d’être félicités pour leur réaction, leur science et leur capacité à tirer la sonnette d’alarme au niveau mondial« . Ajoutant que ce développement montre combien il est important de disposer d’excellentes capacités de séquençage et de partager son expertise avec d’autres.

La réaction à l’annonce de la nouvelle variante découverte par les autorités sanitaires sud-africaines a également été rapide. Les autorités britanniques ont annoncé jeudi que six pays africains seraient ajoutés à la « liste rouge » des voyages en Angleterre après que l’Agence britannique de sécurité sanitaire a fait part de ses inquiétudes concernant la variante.

Le ministre britannique de la santé, Sajid Javid, a déclaré que les vols à destination du Royaume-Uni en provenance d’Afrique du Sud, de Namibie, du Lesotho, du Botswana, d’Eswatini et du Zimbabwe seraient suspendus à partir de vendredi midi et que les six pays seraient ajoutés à la liste rouge – ce qui signifie que les résidents britanniques et les ressortissants britanniques et irlandais qui rentrent chez eux depuis ces points de départ doivent subir une quarantaine de 10 jours dans un hôtel, à leurs frais.

Vendredi, M. Javid a déclaré qu’il était « très probable » que la variante B.1.1.529 se soit propagée au-delà de l’Afrique australe. Dans une déclaration à la Chambre des communes du Royaume-Uni, il s’est dit préoccupé par le fait qu’elle puisse « poser un risque substantiel pour la santé publique ».

Les États de l’Union européenne (UE) ont convenu d’introduire des restrictions temporaires sur tous les voyages vers l’Union européenne en provenance d’Afrique australe en raison de la nouvelle variante Covid-19. Ils ont également décidé « d’introduire rapidement des restrictions sur tous les voyages vers l’UE en provenance de 7 pays de la région d’Afrique australe : Botswana, Eswatini, Lesotho, Mozambique, Namibie, Afrique du Sud, Zimbabwe », a déclaré Eric Mamer, porte-parole de la Commission européenne.

Singapour, le Japon, la Malaisie, les Philippines, Israël, la Turquie, l’Égypte, Dubaï, l’Arabie saoudite, Bahreïn et la Jordanie ont également annoncé de nouvelles restrictions pour les voyageurs en provenance de la région.

Le Canada va  » interdire l’entrée aux ressortissants étrangers […] qui ont voyagé en Afrique australe au cours des 14 derniers jours « , en raison de la nouvelle variante du coronavirus, a déclaré le ministre de la Santé, Jean-Yves Duclos, lors d’une conférence de presse vendredi. « Les Canadiens, les résidents permanents et les personnes ayant le droit d’entrer au Canada seront testés à leur arrivée, ils seront mis en quarantaine jusqu’à ce qu’ils obtiennent le résultat d’un test négatif« .

L’Afrique du Sud, a subi trois importantes vagues de Covid-19 depuis le début de la pandémie. Bien que le nombre de nouvelles infections dans le pays soit encore relativement faible et que les taux de positivité soient inférieurs à 5 %, les responsables de la santé publique ont déjà prédit une quatrième vague en raison de la lenteur de l’adoption du vaccin.

L’Afrique du Sud a entièrement vacciné 35,37 % de sa population adulte et son taux de personnes se faisant vacciner a diminué ces derniers jours, selon les données du ministère de la Santé du pays.